L’OCI prône l’unité, la justice et le développement

Par Imran Khan (Premier ministre du Pakistan)

Le 19 mars 2022

 

La convocation de la Conférence islamique des ministres des Affaires étrangères à Islamabad à l’occasion du 75e anniversaire de l’indépendance du Pakistan témoigne de la profonde solidarité islamique qui unit les croyants et le Pakistan.

Deuxième plus grande organisation intergouvernementale, l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) est la voix collective du monde musulman.

Au fil des ans, l’organisation a œuvré sans relâche en faveur des intérêts et des objectifs communs du monde musulman. Elle a contribué à promouvoir la paix et la sécurité à l’international, la compréhension et le dialogue entre les civilisations, les cultures et les religions, ainsi que les nobles valeurs islamiques de paix, de justice et de respect mutuel.

La réunion d’Islamabad se tient à un moment charnière de l’histoire contemporaine. L’ordre économique et sécuritaire mondial établi en 1945 a pâti du recours unilatéral répété à la force, de la nouvelle « guerre froide » et des inégalités croissantes entre les nations et au sein de celles-ci, exacerbées par la pandémie de Covid-19, l’impact du changement climatique et la révolution technologique. Les pays islamiques doivent composer avec ces « nouvelles réalités » et prendre une part active dans l’ordre mondial qui se dessine afin de préserver leurs intérêts individuels et collectifs.

Pour atteindre cet objectif, ils doivent d’abord promouvoir et préserver leur propre souveraineté et leur intégrité territoriale en défendant leurs principes, en veillant à ne pas prendre part aux rivalités entre grandes puissances, en réglant les différends interislamiques et en se prémunissant contre toute ingérence ou intervention étrangère.

L’OCI, en tant que force de paix et de justice, doit dans un second temps réitérer son soutien aux justes causes des Palestiniens et des Cachemiris pour l’autodétermination et la libération du joug étranger. Bien que ces enjeux puissent causer une certaine appréhension, je suis convaincu que l’arc de l’histoire tend vers la justice.

La manœuvre de l’Inde visant à imposer une solution finale au Jammu-et-Cachemire en privant la région de son identité, en modifiant sa démographie et en réprimant brutalement sa population, est vouée à l’échec. La paix et la stabilité durables en Asie du Sud dépendent de la résolution pacifique du conflit du Jammu-et-Cachemire, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies et à la volonté du peuple cachemiri.

Nous aspirons à des relations amicales avec nos voisins, y compris l’Inde. New Delhi devrait créer les conditions propices à un dialogue sincère et fructueux avec le Pakistan et les Cachemiris, en mettant un terme à ses mesures unilatérales dans le Cachemire occupé, y compris celles d’ordre démographique, et en cessant ses violations flagrantes et généralisées des droits de l’homme.

Une réelle opportunité de rétablir la paix et la sécurité en Afghanistan et dans la région s’offre à nous aujourd’hui, au terme de quarante années. Nous devons agir ensemble pour éviter une crise humanitaire et un effondrement économique en Afghanistan, et nous engager activement auprès des autorités afghanes afin de promouvoir les droits de l’homme, en particulier ceux des femmes, d’encourager une plus grande inclusion et de développer des stratégies efficaces pour éliminer la menace terroriste dans le pays.

Nous devons proposer et privilégier nos propres solutions aux problèmes auxquels le monde musulman est confronté. Il est essentiel de résoudre les conflits en Syrie, en Libye et au Yémen par le biais d’un arrangement et d’une coopération entre les pays islamiques concernés, en veillant à exclure toute ingérence non-musulmane dans ces conflits.

L’OCI devrait envisager de se doter de sa propre architecture de paix et de sécurité, afin de promouvoir la résolution des conflits par la voie du dialogue et de la négociation chaque fois que des différends surgissent entre pays musulmans ou avec des entités ou des pays non-musulmans.

Le monde musulman tout entier est bien doté en ressources naturelles et humaines. Nous devons mieux nous concerter en vue d’exploiter nos complémentarités et de renforcer nos capacités. Une action islamique commune dans les domaines économique et commercial constituera un pas important vers une plus grande solidarité et convergence politique.

Si la pandémie de Covid-19 et le changement climatique ont accentué les défis socio-économiques, ils offrent également de nouvelles pistes pour redéfinir les priorités en vue de la cohésion intra-OCI.

Les pays islamiques doivent se rallier aux autres pays en développement pour réunir les ressources permettant de sortir de la pandémie et d’atteindre les objectifs de développement durable. L’allègement et la restructuration de la dette, la réalisation de l’objectif de 0,7 % d’aide publique au développement, la redistribution des 400 milliards de dollars inutilisés de nouveaux droits de tirage spéciaux, l’augmentation des prêts accordés par les banques multilatérales de développement, l’investissement massif des secteurs public et privé dans les infrastructures durables et la collecte des plus de 100 milliards de dollars promis chaque année pour le financement de l’action climatique doivent figurer parmi les mesures à prendre.

Nous devons également exiger l’équité au sein du système financier, commercial et fiscal international. Nous devons faire preuve de fermeté pour enrayer la fuite de milliards de dollars chaque année vers les « paradis fiscaux » du fait de la corruption, de la fraude, de l’évasion fiscale et de l’évitement fiscal.

Les pays de l’OCI doivent se préparer à l’économie mondiale de demain, axée sur la connaissance, intégrée et numérique. L’OCI devrait créer une « Commission pour l’avenir » chargée d’étudier les tendances en matière de science et de technologie, de commerce et de finance, et de recommander une stratégie claire à long terme.

Nous devrions promouvoir la coopération économique avec tous les pays et organismes, en Occident comme en Orient. Par ailleurs, nous devrions exploiter les complémentarités économiques entre les pays islamiques, en ayant recours à la Banque islamique de développement et aux autres institutions de l’OCI. Un groupe d’experts pourrait élaborer un plan de coopération économique, financière, commerciale et technologique entre les États membres de l’OCI.

Enfin, nous devons veiller à ce que notre religion, l’islam, soit respectée dans le monde entier et protéger tous les musulmans, où qu’ils se trouvent. Nous devons nous opposer vigoureusement à la diffamation ou au dénigrement de l’islam, de notre livre saint ou de notre saint Prophète, que la paix soit avec lui.

La campagne officielle visant à transformer l’Inde en un État exclusivement hindou relève de la pire forme d’islamophobie. Les musulmans indiens sont menacés de génocide.

Je me réjouis de l’adoption par consensus par l’Assemblée générale des Nations Unies de la résolution proposée par le Pakistan, avec les pays de l’OCI, qui proclame le 15 mars Journée internationale de la lutte contre l’islamophobie. Nous continuerons à bâtir des ponts, à promouvoir le respect de toutes les religions et croyances et à faire progresser le dialogue mondial entre les civilisations afin de favoriser la coexistence pacifique et l’harmonie interconfessionnelle.

Le Pakistan restera toujours une place forte de l’Islam, défendant les droits et les intérêts des musulmans du monde entier. J’espère réaliser la vision de notre fondateur pour faire du Pakistan un État providence moderne, démocratique et islamique respectant les préceptes de notre saint Prophète, que la paix soit avec lui, tels que pratiqués dans le Riyasat-e-Medina.

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Remarque: l’article original, publié sur le site d’Arab News, est consultable ici: https://www.arabnews.com/node/2045871